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Muséum national d'Histoire naturelle, Direction des bibliothèques et de la documentation. Bibliothèque centrale
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Producteur du fonds ou collectionneur :
Laboratoire d'Agronomie tropicale ; Laboratoire d'Ethnobotanique ; Laboratoire d'Ethnobiologie-biogéographie
Biographie ou Histoire :
NAISSANCE DU LABORATOIRE D'AGRONOMIE TROPICALE
En 1911, le Ministère de l’Instruction Publique et le Ministère des Colonies décident de créer le Laboratoire d’Agronomie Tropicale, relevant de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE) et accueilli dans les locaux du Muséum d’Histoire Naturelle. Dirigé par Auguste Chevalier, le laboratoire étudie les productions végétales tropicales et collecte de nombreux spécimens d’abord en Afrique, puis en Asie (Malaisie, Indochine), et en Amérique du Sud.
Le laboratoire publie ses résultats dans le Journal d’Agriculture Tropicale (fondé par Jean Vilbouchevitch en 1901) dont Chevalier devient le directeur en 1913. En supplément du numéro 146, Chevalier publie un Bulletin du Laboratoire d’Agronomie coloniale, soulignant l’intérêt des travaux de collecte de spécimens exploitables dans les colonies (Hoare 2012 : 1).
La guerre passée, Chevalier lance en 1921 la Revue de Botanique Appliquée et d’Agriculture coloniale. Elle sera publiée jusqu’en 1929, date à laquelle elle devient Revue de Botanique Appliquée et d’Agriculture tropicale (RBA) pour souligner, selon Chevalier, le caractère international de cette revue.
Dans le même temps, alors que la revue gomme son aspect « colonial », le Muséum prend la décision d’associer le laboratoire à une Chaire des Productions coloniales d’origine végétale, alors nouvellement créée. Chevalier, déjà responsable du laboratoire, obtient cette chaire.
Ce besoin d’évolution néanmoins contrarié prend aussi la forme de suppléments insérés dans la revue sous le titre de Compte-rendu de l’association des botanistes du Muséum pour les études botaniques et d’agronomie coloniales (1933-1934).
La chaire, devenue Chaire d’Agronomie coloniale en 1933, ne changera de nom qu’en 1958 pour devenir Chaire d’Agronomie tropicale.
Les recherches menées jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale sont intenses et importantes, afin de répondre aux besoins alimentaires et industriels des pays occidentaux. On développe des recherches sur les plantations ; on travaille à l’amélioration des cultures, etc. On note la multiplication des participations actives de société privées, des compagnies d’économie mixte et des instituts de recherches (Portères 1965 : 2).
A cette période, le laboratoire participe à la diffusion du savoir à travers des enseignements dans certaines écoles spécialisées (Institut d’Agronomie Tropicale, Institut d’élevage et de médecine vétérinaire exotique, Ecole Supérieure du Bois).
Chevalier reste à la tête du laboratoire jusqu’en 1947, puis Roland Portères lui succède.
Entre temps en 1953, la RBA que Chevalier avait créée et à nouveau transformée en 1946 en Revue Internationale de Botanique appliquée et d’Agriculture traditionnelle (RIBA), cesse d’être publiée sous cette forme à la demande de son créateur.
Elle est transformée alors en Journal d’Agriculture Tropicale et de Botanique Appliquée (JATBA) sous l’impulsion de Portères. Elle évolue dans son contenu, en se détournant de son aspect agronomique et en faisant une part plus grande aux connaissances botanique traditionnelles, ainsi qu’à l’origine des plantes cultivées.
Cette transformation est en partie due à l’influence d’A-G. Haudricourt sur les recherches menées au laboratoire dans ces années (Hoare 2012 : 9).
L’influence d’Haudricourt signe l’arrivée d’une nouvelle génération de chercheurs marqués par l’enseignement d’A. Chevalier mais aussi prêts à s’en démarquer pour faire évoluer la discipline vers ce que l’on nommera plus tard l’Ethnobotanique (L. Hédin, H. Jacques-Félix, R. Portères) puis des chercheurs n’étant plus formés à partir de l’Agronomie (J. Barrau, J. Dournes, C. Friedberg, etc.) et venant de plus en plus de l’ethnologie (G. Dieterlen, I de Garine, C. Lévi-Strauss, J-P. Lebeuf, Condominas).
On s’éloigne peu à peu de l’intérêt économique porté par le Laboratoire d’Agronomie Coloniale au profit de l’étude de la relation entre les sociétés humaines et le monde végétal. Ce développement s’appuie alors selon Portères, sur l’idée que cette relation fut primordiale dans l’évolution des sociétés humaines, et que la poursuite de leur étude porte en elle des avancées pour le futur (Portères 1965 : 3).
TRANSFORMATION EN LABORATOIRE D'ETHNOBOTANIQUE
« L’Ethnobotanique est une discipline interprétative et associative qui cherche, utilise et interprète les faits d’interrelations entre les Sociétés Humaines et les Plantes en vue de comprendre et d’expliquer la naissance et le progrès des civilisations, depuis leurs débuts végétaliens jusqu’à l’utilisation et la transformation des végétaux eux-mêmes dans les Sociétés primitives ou évoluées. Elle n’étudie en eux-mêmes, ni les Plantes, ni les Sociétés humaines, ni les Hommes » (Portères 1961 : 102).
C’est ainsi que R. Portères opère un changement épistémologique et qu’il classe dès lors cette discipline dans les Sciences Humaines. A ce titre, il obtient en 1963 de transformer la Chaire d’Agronomie Tropicale en chaire d’Ethnobotanique en 1963, et le laboratoire se délie alors de l’aspect colonial de la démarche initiale, tout en accentuant celui de l’ethnobotanique que Chevalier lui-même avait commencé à instituer. Le laboratoire est lui-même renommé Laboratoire d’Ethnobotanique.
R. Portères définit les sources et les moyens de travail dans un article datant de 1961. Il note alors l’importance, assez classique, des sources bibliographiques. Il détaille ensuite le type de documents utiles à l’exercice de cette discipline et cela recouvre l’étude de restes archéologiques, l’enquête ethnobotanique, la collecte de spécimens et la constitution de nouveaux herbiers et aussi de collections de plantes vivantes, ainsi que l’étude des pollens. L’action humaine doit être aussi étudiée minutieusement, selon cette idée directrice que l’on interroge dès à présent la relation entre l’Homme et son Environnement : inventaire des usages des espaces (jardins, enclos, champs, terroirs, plantations et cimetières, etc.), de la collecte et de la consommation des plantes, effets humains sur l’environnement végétal.
Cette discipline ethnobotanique émane par ailleurs du développement de la recherche qui prit place dès la fin du XIXème siècle aux Etats-Unis, sur les restes archéologiques permettant de déterminer des usages anciens de certains végétaux (Brousse 2015 : 2). Les universités d’Harvard et du Michigan proposent déjà des enseignements d’ethnobotanique, alors que R. Portères professe ses visées programmatiques pour une ethnobotanique française.
En 1966, le Laboratoire d’Ethnobotanique est transformé en Laboratoire d’Ethnobotanique et d’Ethnozoologie et se double de la création de la Société d’Ethnozoologie et d’Ethnobotanique (SEZEB) dont R. Portères est président et C. Friedberg secrétaire. Cela marque un nouveau tournant dans les conceptions à l’origine de la discipline puisque l’on élargit l’études des relations des sociétés humaines à l’ensemble des êtres vivants et que de nombreux chercheurs, d’horizons divers, participent à la recherche menée au laboratoire. Dans ce cadre, s’élabore le fichier interdisciplinaire, à des fins de documentation de l’ensemble des relations entre les hommes et les animaux d’une part, et les plantes d’autre part.
L’élaboration de ce fichier est une raison pour laquelle R. Portères, alors responsable du laboratoire, fait une demande de financement d’un Projet de Recherche Coopérative sur Programme (RCP) auprès du CNRS. Il obtient le financement de deux RCP successives : la RCP 97 (1966-1971) puis la RCP 295 (1972-1977), au sein desquelles C. Friedberg œuvre pour l’Indonésie et l’Amérique du Sud.
Entre-temps en 1973, à la suite du décès de R. Portères, Jacques Barrau prend la direction du laboratoire. Il participe à la transformation de la RCP en Equipe de Recherche Associée (ERA 773) en 1978. Ce changement de structure de recherche marque un tournant. A la RCP, portée par un professeur auxquels sont associés des pairs et des assistants, se substitue une ERA dont les spécificités sont qu’elle est déjà bien constituée et par là, financée sur la base d’une « unité de lieu, d’une thématique forte et surtout d’une masse critique de chercheurs » (Orain et Sol 2017 : 1-2). L’ERA constitue une transformation pérenne des activités menées dans le laboratoire.
La revue accuse de son côté, un arriéré de publication et Barrau lance quelques changements afin d’y remédier. La multiplication des financements complexifie fortement le fonctionnement interne de la revue et le rythme des publications s’en retrouve fortement impacté. En 1988, un dernier numéro de la revue est publié avec un retard de deux années.
Un nouveau chapitre s’ouvre à travers l’arrivée du géographe Yves Monnier, nommé à la fois directeur du laboratoire et directeur de la publication.
LE LABORATOIRE D'ETHNOBIOLOGIE-BIOGEOGRAPHIE
Entre 1985 et 1986, deux changements sont opérés.
En 1985, L’ERA est transformée en Unité de Recherche Associée (URA) et voit arriver C. Friedberg à sa tête. Cette URA 882 est nommée « Appropriation et Socialisation de la Nature » (APSONAT). Elle est toujours partie prenante du Laboratoire d’Ethnobotanique qui se transforme en 1986 en Laboratoire d’Ethnobiologie – Biogéographie et se dote d’un nouveau responsable, Yves Monnier.
Dans les années 1987-1988, le JATBA en proie à des difficultés éditoriales, cesse d’être publié. Sa restructuration et la mise en place d’une nouvelle politique éditoriale s’étendent sur six années (Hoare 2012 : 1).
En 1994, sous l’impulsion de Bernard Roussel, on relance une nouvelle version de la revue alors intitulée JATBA – Revue d’Ethnobiologie.
En 1998, L’URA est transformée en UMR (Unité Mixte de Recherche). Cette UMR 8575 conserve le nom et les visées scientifiques d’APSONAT, sous la nouvelle direction de Marie Roué.
Le dernier numéro du JATBA – Revue d’Ethnobiologie est publié en 2005 et consiste en un hommage à J. Barrau.
En 2012, une nouvelle ère s’ouvre pour le laboratoire et la revue, désormais Revue d’Ethnoécologie.
La Revue d’Ethnoécologie signe le changement d’orientation opéré au sein du laboratoire, désormais nommé Laboratoire d’Eco-anthropologie et Ethnobiologie (UMR 7206) et dirigé à partir de 2002 et jusqu’en 2018 par Serge Bahuchet.
AUJOURD'HUI, LE LABORATOIRE D'ECO-ANTHROPOLOGIE
De nos jours, le laboratoire d’Eco-anthropologie est une unité mixte de recherche (UMR 7206) du Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et de l’Université Paris Diderot (Paris 7). Elle est dirigée par Evelyne Heyer. L’unité est rattachée à l’institut INEE au CNRS et au département « Homme et Environnement » du MNHN.
Conditions d'utilisation : La reproduction et la publication sont soumises à conditions, consultables sur le site Internet des bibliothèques du Muséum : http://bibliotheques.mnhn.fr
Citer sous la forme : Muséum national d’Histoire naturelle, Bibliothèque centrale, ARCH EBIO ...
Bibliographie :
Brousse, Carole. « L’ethnobotanique au carrefour du Muséum national d’Histoire naturelle et du Musée ethnologique de Salagon (Alpes-de-Haute-Provence) ». Revue d’ethnoécologie, no 7 (26 janvier 2015).
Hoare, Catherine. « Le JATBA et ses ancêtres. Essai d’histoire de la revue d’un laboratoire du Muséum national d’histoire naturelle ». Revue d’ethnoécologie, no 1 (20 novembre 2012).
Orain, Olivier, et Marie-Pierre Sol. « Les géographes et le travail collectif. La recherche coopérative sur programme à l’œuvre ». La revue pour l’histoire du CNRS, no 18 (3 octobre 2007).
Portères, Roland. « Le Laboratoire d’Ethnobotanique du Muséum National d’Histoire Naturelle ». Journal d’agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, 12, no 1 (1965): 1 4.
« L’ethnobotanique : Place - Objet - Méthode - Philosophie ». Journal d’agriculture traditionnelle et de botanique appliquée 8, no 4 (1961): 102 9.